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Articles de Presse

Voici un article paru dans le magazine "Rock 'n Folk" de mai 2012, écrit par Philippe Thieyre, concernant les trois albums d'Emmanuel Booz, "Le Jour où les Vaches...", "Clochard" et "Dans Quel Etat j'Erre".

Un petit plus concernant des bonus tracks parus sur ces rééditions a été rajouté par votre fidèle serviteur.

 

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Emmanuel Booz

Le Jour où les Vaches... - Clochard - Dans Quel Etat j'Erre

(Musea)

"Le jour où les vaches auront du poil aux dents/Je rirai peut être comme un dément..." Ces paroles situent déjà l'homme parmi les grands allumés du rock français, de ceux qui se moquent des conventions et ne se préoccupent ni de la justesse de la voix, ni du format standard des chansons. Emmanuel Booz hurle ses questions existentielles à la face de la société en bâtissant des architectures sonores incroyables, sans jamais craindre l'outrance ni céder à la tentation du bon goût ou de la mesure. Après "Au Restaurant d'Alice", adaptation française d'"Alice's Restaurant", en 1969, Booz va sortir, respectivement en 1974, 1976 et 1979, ces trois albums aujourd'hui réédités par Musea, agrémentés de bonus tracks sur chaque édition, produits par Gérard Doustin, hormis "a quoi tu songes" et "faut changer le numéro", où il est accompagné par la fine fleur du rock progressif français, n'hésitant pas à se lancer dans des morceaux de seize minutes. On peut être irrité par sa diction ou sa grandiloquence, sa liberté est cependant unique et les arrangements, par moments, somptueux. De nos jours, écouter ces trois disques est une oeuvre de salubrité publique.

Philippe Thieyre

 

Manu dans quel etat jerre

 

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Article paru dans le livre
"Philippe Manoeuvre présente : Rock Français
les 120 albums qui ont marqué la musique
rock française à ses débuts"
paru aux éditions Hoëbeke en 2010
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1979
 
Emmanuel Booz
 
« Dans quel état j'erre »
 

(Polydor)

 

l'Ôde aux Rats - La Symphonie Catastrophique - Armoire et Persil)
 
Booz ou le poète cosmique atomique du rock français. Le bébé Booz est recueilli par des Résistants, gens de l'ombre qui l'élèvent au péril de leur vie et lui communiquent une éthique, amour de la terre, remise en question de l'ordre établi, envie viscérale d'en découdre avec le monstre nazi. D'abord peu passionné par les histoires de guerre et de résistance, Booz adolescent est membre fondateur de la fameuse bande du Drugstore (des Champs Elysées), mélange d'esprits beats, de rockers impénitents, mods anti-conformistes, fils à papa, futurs paroliers, cinéastes, DJ, journalistes, acteurs, premiers folkeux, littérateurs, branleurs. Entre 1968 et 1978, il enregistre cinq 45 tours et autant d'albums. Aucun de ces disques n'a jamais été édité officiellement en CD, pourtant on trouve nombre de sites dédiés au barde et des commentaires flatteurs sur la Toile, du Japon à l'Oural. Artiste, prophète, lover, fils spirituel de Léo Ferré pour les uns, seul créateur dépassant Ange et Magma pour les autres, Booz promène sa silhouette hugolienne et sa romantique crinière neigeuse sur toute l'affaire. Le plus étonnant n'étant pas une soudaine reconnaissance des milieux hip-hop qui voient (très justement) en Dans Quel Etat j'Erre le premier album rap de langue française !
 
Repéré au Golf Drouot, où il chantait du rock en yaourt, puis dans des happenings futuristes, Booz commence par adapter en français un poème d'Arlo Guthrie de dix huit minutes, « Au Restaurant d'Alice ». Succès d'estime 1969. On salue sa performance en une prise unique et live en studio. D'abord signé chez Barclay, il migre chez Warner pour l'album Le Jour Où Les Vaches... (1974), dans lequel il scande un long poème écologique prophétique annonçant nos ennuis actuels avec une maestria de Nostradamus progressif. On le retrouve au milieu des seventies, toujours électron libre du rock français, poète beatnik psychédélique révolutionnaire. En 1976, Booz est mûr pour l'auto-production. Lassé d'errer dans les bureaux des maisons de disques, il investit un studio prêté. Les exigences des séances payantes ralentissent le processus, mais Booz trouve le moyen, sur un an, d'enregistrer à l'arrache trois titres légendaires. « Ode Aux Rats » dure seize minutes et occupe toute la première face. La seconde s'ouvre sur « La Symphonie Catastrophique » (9,45 min) et se conclut par « Armoire Et Persil » (8,35 min). Ce matériel n'est pas précisément destiné au hit parade. Pourtant Booz a rassemblé une équipe de musiciens hors pair : Jean Schulteis à la batterie, Didier Lockwood qui tire là quelques-uns de ses plus diaboliques solos de violon, Majhun, Gérard Pisani et la crème des requins parisiens complètent un groupe qui sonne comme un Mahavishnu Orchestra déjanté, sur lequel Booz pose des voix étonnantes, délirantes, hurlées, scandées. Aidé de Jean-Claude d'Agostini, premier guitariste de Coluche, Booz a magnifiquement structuré ses poèmes entre blague zappienne et déraillage hard rock, nouveau nihilisme potache et urgence rimbaldienne. Son argot est celui des musiciens de Paris : « A l'aise Blaise » ou « Saint-Cloud béret basque » (pour thank you very much, expression consacrée des guitaristes de métro). Mais tant d'humour ne peut suffire à cacher le grand message du poète « consterné par la connerie humaine ». Nulle condescendance, Dans Quel Etat j'Erre décrit le monde d'aujourd'hui, précisément, chirurgicalement. Booz ne reconnaît plus les hommes. C'est Moïse redescendant de la montagne de Woodstock et constatant que Mai 68 n'a rien changé. Alors, sans cesse, Booz retrouve l'argot de la rue - « Je pédale dans la semoule Raoul » - et constate, entre deux striures de synthés, deux chandelles de guitare hurlante, la prolifération de nouveaux clochards, parias rejetés de la civilisation atomique par ailleurs totalement maléfique, puisqu'elle ravale les humains en animaux. « Les hommes sont devenus des chiens et si tu touches à leur assiette/Ils te déglinguent à la mitraillette ». Alternant rap et talk over avec les chants de Te Deum électronique et des flashs de Brel, le chanteur creuse avec cet album une voie unique, totalement française. Est-ce l'influence du grand Ferré, qui avait réclamé Booz en première partie de ses concerts à la Mutualité ? Booz a donné un seul concert avec son groupe mais des dizaines de performances en live avec sa guitare, assurant notamment tout seul, à l'impro, une légendaire et triomphale première partie d'une longue tournée Family.Booz, clochard céleste du rock français. Tous ses projets déjantés et irréels trouveront le chemin des bacs via des majors, et si aucun de ses albums ne dépasse 5000 exemplaires, le chanteur reste satisfait de ces chiffres « puisqu'ils montrent que j'avais touché tout l'underground français ». N'importe, Dans Quel Etat j'Erre mettra deux ans à sortir ! C'est cette volonté d'être souterrain, toujours en liaison entre Kerouac, Ginsberg et les ouvriers de chez Renault, qui rend les quelques enregistrements de Booz uniques. Son souffe est bien celui de la révolte triple. C'est une intensité qui vient de loin, Commune, Résistance, rock'n'roll, folk... Emmanuel Booz est le grand poète méconnu du rock français. Il a trouvé une seconde vie dans le cinéma, où ses scénarios sont appréciés du grand public comme des amateurs véritables...
 
Philippe Manoeuvre
 
Manu recent bio 01
 
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RENCARDS
 
Emmanuel Booz
 
Nouvelle énergie, nouvelle stratégie
 
Histoire de voix...
 
Dans la chanson se mêlent des voix étonnantes, voire irritantes pour certains (Chamfort, Balavoine, Couture, Christophe, Juvet, Gainsbourg, Thiéfaine, Dutronc, Manset...), des voix sublimes (Christiani, Polnareff, Lara, Engel), des voix verglaçantes (Sapho, Corringe, Mama Béa, Ribeiro) des voix envoûtantes et chaudes (Dietsch, Lavilliers, Mc Neil, M.J. Vilar, Castelain, Zacha, Berceville), des voix émouvantes, un peu voilées, un peu fêlées (Wertheimer, Gilly, Valière...) d'autres encore (Gotainer, Esther Galil, J. Birkin, Annegarn, Higelin, Bashung, Matioszeck...), chacune son timbre. Booz, lui, donne dans les voix prodigieuses, génératrices de longs frissons, tout comme Jonasz et Montagné...
 
Histoire de voix...
 
La plus compliquée : celle des plus durs, des plus résistants (surtout à la connerie et au sous-développement intellectualo-sensoriel des cellules dites grises des ignares qui gèrent le milieu de la musique ici). Celle des rameurs acharnés, style Markusfeld, Higelin, Castelain, quel l'alternance de la bêtise et de l'incompréhension, des jalousies causées par leur talent et de leur occultation délibérée par le métier, ne sidèrent pas... ou plus. Race de visionnaires et trajectoires lumineuses... Même à l'ombre...
Après le folk et un intermède acoustique planant (Ma Terre, 72), Booz attaque très fort en 74 avec son second album : Le Jour Où Les Vaches... La claque dans la gueule de cette année-là (contenu autant que contenant) ! Arrangé par l'infernal duo William Sheller/Alain Suzan, l'album est explosif. En droite ligne derrière La Mort d'Orion de Manset (69), Le Monde en Etages d'Alain Markusfeld (70) et La Nuit des Cigales de Michel Zacha (72), trois albums in-con-tour-nables ! Emmanuel Booz cartonne en noir. « No future » avant la lettre. Constat méthodique et, en ce sens, terriblement effrayant, d'une dérive générale organisée... qui ne lèse pas tout le monde !
 
Album politique dans le sens où les dénonciations de Booz visent, juste et fort, qui de droit : politiciens, économistes, industriels, adultes sont sérieusement étrillés (euphémisme !) Manu revendique déjà, bien avant Renaud et parallèlement à Castelain (Albéria, 74), le droit à l'enfance préservée, aux rêves non dirigés... Les arrangements symphoniques et flamboyants de Sheller donnent à ce disque une auréole d'album-cathédrale. Beau ! Beau ! Putain ! Beau à s'en faire crever la tête d'incrédulité ! Entre Céline et Mallarmé ; Breton et Nerval ! Poésie partout ! Lucidité aussi !
 
Un 45 tours en 75 puis Clochard, en 76, n'indiquent aucun virage : Manu déjante toujours à mort ! La vie le mine (pourtant le football prime de beaucoup sur la musique en maintes occasions) mais ce « dilettante » de génie et de très grande classe ne se sent décidément pas à l'aise quand bien même ce serait dans des tennis. Niveau volume sonore, les vue-mètres indiqueraient plutôt une tendance générale à la baisse, mais le fond reste identique : Rock aérien à pulsations souterraines. Inquiétant... Impressionnant. Une chanson-testament bouleversante (A Vous Tous) sur cet album somptueux, fait pendant à une tentative de s'auto-rassurer (Ma Vie Est Bien Comme Ca), l'honnête moyenne du disque se situant en pleine glauquerie macabre (La Chanson Des Pendus, Cent Mille Ans)...
 
Trois ans de silence pour aboutir à « Spartacus », le label de jean-Pierre Castelain. Les deux oiseaux se connaissent déjà pour avoir été dans la même taule de disques. Ce qui va les réunir est une identité de direction qu'ils donnent depuis toujours à leur démarche musicale, sociologique et politique : « apprendre aux gosses à s'émerveiller des étoiles, à bâtir des cathédrales » (dixit Castelain), à ne plus se complaire dans le merdier général, que celui-ci soit politique, social, technologique ou personnel, qui est destiné à leur baiser la gueule dès le départ. Pour ça, la musque est un passeport idéal, les mots pouvant semer au gré des ondes humaines (pour peu qu'elles soient réceptives) autant d'espoir, d'appel à l'action et au combat que la vie se charge de semer de mort et de détresse.
 
Rencontre-choc de deux regards bleu-délavé pareillement désabusés mais conservant intacte la même volonté d'éviter le piège du renoncement à ses rêves, de la capitulation devant d'adversité... orchestrée. De deux paranoïas contre la connerie devenue incommensurable...
 
Jean-Pierre Castelain porte alors à bout de bras et de souffle l'éclosion de cet album-cauchemar (Dans Quel Etat j'Erre..., 1979), de cet album insensé, tant du point de vue de la violence, encore jamais intensifiée à ce point dans le domaine musical occidental, toutes tendances et toutes origines confondues (peut-être MC5 ou Jefferson Airplane ? Peut-être les Stooges ou John Cale ? Rien de moins sûr...) que dans le domaine de sa portée ; en trois titres, Ode aux Rats, La Symphonie Catastrophique et Armoire Et Persil (en clair : au revoir et merci), dédiée à Brel, Booz exécute la moindre étincelle d'espoir d'une vie meilleure qui aurait pu survivre dans quelque crâne égaré ou quelque cerveau attardé !
La Révolution viendra de la boue et des rats, qu'on se le dise ! Le rêve aura alors à nouveau la parole. En attendant, il était surtout urgent d'entretenir (voire de motiver) la flamme, même sous-jacente, de la révolte et de la jeunesse... Autant dire que l'album-fin du monde de Manset paru l'année précédente, 2870, était largué loin derrière en ce qui concerne le poids des notes et le choc des urgences !
 
Comment ces deux-là ont pu survivre à des albums pareils reste assez énigmatique.
 
83... Et Booz ou, plus justement, « Manu », puisque, sur la pochette de ce 45 tours, ne figure plus que le diminutif de son prénom «(« Le « Booz » est parti en vacances », se plaît-il à répéter), revient avec un single toujours produit par Castelain qui, cette fois, s'est installé, de surcroît, aux guitares et à la console...
 
Deux chansons complètement à part. A prendre à la fois au premier et second degrés : au premier pour le sérieux avec lequel fut enregistré et peaufiné le disque ; au second pour la manière qu'a adoptée Emmanuel Booz de le faire passer pour un gigantesque gag. Faut dire que le bougre a de quoi se marrer en songeant, qu'après quatre albums quasiment jamais programmés, il suffit d'une chanson de trois minutes pour cartonner sur la quasi-totalité des radios libres de la capitale. Seules, les grandes stations semblent faire la fine bouche, comme toujours.
 
Alors le grand Duduche du rock d'ici rigole... profitant de ce disque-pause pour préparer un album « définitif, urbain et atomique » au sein d'un groupe en gestation : European Suicide (tout un programme !). Après la rupture-gag, la reprise dans une continuité des plus logiques : le bout du vide et du délire... Mais c'est une autre histoire...
 
En attendant, où va-t-il donc s'arrêter ? « Après le définitif, l'infinitif. Après l'infinitif, peut-être bien l'asile... » comme il le dit lui-même ? Allez savoir... (après quinze ans de galères ce ne serait pas étonnant !)
Et si ce visionnaire d'Emmanuel Booz pouvait même prévoir son propre avenir ?...
 
Thierry Hexylaine
 
Manu bassiste bio 02
 
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Article paru dans le livre
"Swinging Sixties
Londres-Paris"
de Christian-Louis Eclimont
éditions Flammarion
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Emmanuel Booz
 
Une exception française
 
De la bande du Drugstore au restaurant d'Alice
 
Progressif ou progressiste ? Les deux ! A l'aune d'un Rimbaud empochant à l'issue d'un pince-fesse la petite cuillère en argent, d'un Kerouac mystique chaussant ses bottes de sept dieux pour n'en prier aucun, d'un Bakounine berrichon, sa province de petite enfance, aussi barbu mais plus musicien, Booz, qui ne s'endort jamais, vibrionne comme le premier chanteur underground français. Enfourchant les mots à la Dada, lanceur d'idées – cocktails Molotov ! - ,aux retombées acides mais aussi metteur en humour des faillites annoncées, ce Tycoon de la contre-culture signe chez Barclay, par l'entremise de Léo Missir, à la moitié des années soixante. Agitateur agité, il s'est surtout commis jusqu'alors dans les soirées ou les rallyes, s'accompagnant à la guitare, débitant une logorrhée en yaourt qui se substitue aux paroles. Sur le label de Monsieur Eddy, il se force à mailler des poèmes et fournit le projet délirant d'une comédie musicale centrée sur l'Ancien Testament dont il va extraire un 45 tours, le Mont des Oliviers. Il apparaît à la télévision en djellaba entouré de moutons, favorisant en digne anarcho-spontanéïste, le troupeau mieux que la ligue ou à la procession. Booz n'a pas la fibre pro, préférant l'agit-prop aux terrasses des cafés ou dans les bars interlopes de Pigalle. Il milite contre la guerre d'Algérie, prophétise bible en main, et à revers de l'évangile révolutionnaire cadré, il annonce des temps contrariés lorsqu'il délivre la première chanson écologique avant la date, Ma Terre. Par Elvis, il est grand, par Dylan, il est fort. 68 le saisit sur les barricades qu'il traverse à la mesure d'un gigantesque happening, alternant de concerts à la Mutualité aux scènes mouvantes des festivals, de premières parties de Léo Ferré qui l'apprécie à celles de Soft Machine. Détourné de la célébrité, il cherche à éveiller les consciences, un ambitieux chantier auquel il se cheville. En 1969, son ex-congénère de la bande du Drug', le parolier Boris Bergman le rapproche d'Arlo Guthrie. En dix minutes, à l'hôtel Saint-André-des-Arts, le poète américain le mandate pour interpréter en français son fameux Alice's Restaurant, un manifeste anti-guerre du Viêt-Nam. La version originale de dix-sept minutes est tronçonnée en plages de trois minutes, et le disque français sort dans un relatif anonymat. Nonobstant, Booz double le cap des seventies dans une identique disposition d'esprit et perdure à enregistrer d'autres trente centimètres d'une même teneur underground. Dans Quel Etat j'Erre ?, Le Jour Où Les Vaches, autant d'oeuvres cultes qui s'arrachent encore sous le manteau. Un tiers mondain, deux tiers mondiste, sur les décombres incandescentes de la contre-culture, Booz pavoise, visionnaire dans une époque où le monde promettait d'être meilleur. Acteur dans de nombreux films, aujourd'hui Emmanuel Booz est scénariste.
 
Christian-Louis Eclimont
 
 
Manu articles de presse 01
 
 
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Le Dictionnaire du Rock
 
Emmanuel Booz
 
Un premier album somptueux et fou dans la lignée de « La Mort d'Orion » de Manset ; un second plus rangé produit par Joël Dugrenot et où alternent les chansons éthérées et des arrangements rock. « Le Clochard » (WEA). Beaucoup de talent méconnu.


 

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TELE ORANGE
67 Rue de COURCELLES
75008 PARIS
 
HEBDO DISKKK
 
par Philippe Adler
 
Quelques nouvelles têtes...
 
Booz
 
Un fou. Rock et tout. Comme ses précédents albums n'ont pas marché, il ne s'est trouvé personne pour produire celui-là : « Dans Quel Etat j'Erre » (33 t-30 cm. Polydor 2393 259). Comme quoi, les producteurs ne sont pas forcément malins car c'est un diable de bel album. Oh, pas facile, pas commercial, assez déroutant. Mais ceux qui feront l'effort de s'y plonger se régaleront. Surtout si c'est la musique de groupes comme Yes ou Genesis qui les branche. Booz a du talent. Ca finira bien par se savoir. Mais c'est long.
 
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L'ESCARGOT
43 Rue Léon Frot
75011 PARIS
 
Août 1980
 
Emmanuel Booz
 
Dans Quel Etat j'Erre
 
(Polydor 2393 259)
 
Sur la pochette, une ligne à haute tension sur fond de ciel de plomb et de feu. L'intro : un document sonore inédit, le bruit d'une vieille chasse d'eau catarrheuse, une authentique Jacob Delafon modèle 50, que ne renieraient pas Syd Barrett ou Plume Latranverse, autres chasseurs de sons insolites.
Après ces petits détails matériels, on rentre dans le vif du sujet : « l'Ode aux Rats », une longue pièce de plus d'un quart d'heure qui navigue dans un délire musical vertigineux. Des résonances wagnériennes les plus somptueuses aux folies électriques les plus joyeuses.
« Ratopolis est souterraine,
C'est la cité de la déveine.
Pour essayer de voir le jour,
Il nous faudrait un peu d'amour,
Mais y'a des pièges dans tous les coins
Les hommes sont devenus des chiens
Et si tu touches à leur assiette
Ils te flinguent à la mitraillette...
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Hé, c'est pas une oeuvre, mec,
C'est l'Ode aux Rats,
Une ode pour les enfants, pour
Les paumés,
Qu'ont le deuil accroché là haut
Sur leurs paupières
Comme une arrogance.
C'est pas une oeuvre, mec,
C'est l'cri d'ma déchirure
C'est l'cri d'mon impuissance... »
Ca coule tout seul, comme si c'était naturel. Là où d'autres peinent pour ânnoner trois strophes, Booz respire et chante à pleine voix, joue à pleins poumons. Une voix superbe, à vous donner des frissons dans le dos. Il chante peu, rarement pour rire, et jamais pour ne rien dire : sa parabole des rats vaut tous les discours les plus désabusés ou les plus humanistes.Le rock contemporain sait être grandiose. Et à côté de ce monument inouï, les petite srévoltes punk ou rive-gauche paraissent furieusement dérisoires. La folie a parfois des accents de lucidité terribles.
 
Rémy Le Tallec
 
Manu recent bio 02
 
 
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NORD MATIN
19 Rue Edouard DELESALLE
59000 LILLE
 
BOOZ
 
(Polydor – 2393-259)
 
On peut penser à Gérard Manset, et à Léo Ferré du temps des Zoo ou bien plutôt à un Mona Lisa plus agressif, toujours est-il que Booz n'est pas conseillé à celui qui sortirait de chez lui dans le but d'aller voir un De Funès au cinéma. Booz, c'est une sorte de Mama Béa qui aurait un penchant particulier pour explorer le monde de la folie.
 
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Le Dictionnaire de la Rock-Music
 
EMMANUEL BOOZ
 
Quatre albums et plusieurs 45 tours à son actif, tous d'excellente qualité, font d'Emmanuel BOOZ un chanteur et un poète reconnus. Il évoque parfois Pete Brown par sa voix cassée et nasillarde et son inspiration poétique quelquefois délirante. Son inspiration par moments revendicatrice aborde des sujets engagés (Chanson Liberté) mais est toujours parfaitement mise en valeur par une musique adaptée au climat émotionnel qu'il veut susciter par ses textes et selon les thèmes évoqués, elle se fait intimiste, dépouillée ou violente, parfois à la limite de la folie. Un des meilleurs chanteurs et poètes du Rock Français.
 
LP : Au Restaurant d'Alice (Barclay 920.186) 1970
LP : Le Jour Où Les Vaches (Atlantic WEA 50.095) 1974
LP : Clochard (Atlantic WEA 50.294) 1976
LP : Dans Quel Etat j'Erre (Polydor 2393 259) 1979
SP : Rosie Rag/La Robe en Bois (Barclay 61314) 1970
SP Ma Terre/Tout est Très Bien Comme Ca (Barclay 61420 L) 1971
SP Donne/l'Homme aux Mille Clés d'Or (Atantic-Promo) 1974
SP Chanson Liberté/Et On l'Appelait Emmanuel Booz (Atlantic WEA 10 633) 1975
 
Ffi articles de presse
 
 
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Article paru dans le BBI de juillet 2022

Emmanuel Booz, un poète dans la ville

 

"Cette ville est la matrice de mon existence. Je me rends sur l’île Seguin pour écrire des poèmes. Je me promène dans Boulogne-Billancourt avec un plaisir toujours renouvelé"

C’est à Boulogne-Billancourt que le rocker et poète Emmanuel Booz a grandi après la guerre. Il continue d’y écrire ses poèmes, vivant comme il a toujours vécu, entre cafés et jardins. Portrait d’un drôle d’aventurier que les Boulonnais d’hier et d’aujourd’hui ont forcément croisé un jour, au coin d’une rue…

Dans le café où il nous a donné rendez-vous, Emmanuel Booz ne passe pas inaperçu avec sa chevelure blanche qui lui donne un air de Johnny Winter, le guitariste albinos de rock américain. À bientôt 80 ans, habillé de noir, d’un tempérament chaleureux, il a gardé l’allure du beatnik qu’il fut dans sa jeunesse. Devant un bon jus de pomme (il ne boit pas d’alcool), il nous raconte sa vie fleuve percutée par tout ce que le XXe siècle a brassé de tragédies et de renaissances, la guerre, la découverte d’Elvis Presley, la lecture du livre Sur la route de Jack Kerouac. Né en 1943 à Versailles, Emmanuel aura eu du monde une première vision terrifiante : la mitraillette d’un gestapiste venu fouiller la maison de son grand-père, à Vierzon. Ses parents maquisards parviennent à le sauver et le cachent dans la campagne. Le petit garçon y restera plusieurs années, élevé par des résistants, avant que sa mère et son père, un jour de 1948, décident de le récupérer et l’emmènent à Boulogne Billancourt, où ils pansent leurs douloureux souvenirs. Emmanuel a 5 ans. S’il retourne souvent voir sa famille adoptive, il découvre le joli square des Longs-Prés, les terrains vagues, l’école maternelle de la rue Thiers. Il grandit entre les belles amitiés et les parties de football au sein de l’ACBB : "On avait un beau terrain sur les quais de la Seine." Sa bande d’amis et lui dansent dans la salle des fêtes, écument les cafés de la place Marcel-Sembat. Emmanuel retrouve son père qui mène des chantiers un peu partout sur la planète et prend goût au nomadisme.

COSMIQUE ET ATOMIQUE

On le croise, par exemple, à New York en 1965, flanqué de sa guitare et de ses poèmes. Plus tard, il enregistre un disque avec Arlo Guthrie, (fils de l’icône de la folk song Woody Guthrie), lui-même artiste culte depuis sa prestation au festival de Woodstock. "Qui étais-je pour cette star ? Un franchouillard avec sa guitare, et pourtant, il me propose une collaboration." Ce sera l’adaptation française, en 1969, du fameux disque d’Arlo, « Alice’s Restaurant », dont les chants illustrent le film libertaire d’Arthur Penn. Emmanuel publie trois autres albums, « Le jour où les vaches » (1974), « Clochard » (1976) et « Dans quel état j’erre » (1979) accompagné du regretté violoniste Didier Lockwood. Ses compositions, riches de jeux de mots drôlatiques passés dans le langage courant («  à l’aise, Blaise  »), navigue entre psychédélisme rageur et imprécations rappelant Léo Ferré, qui lui propose de faire sa première partie. Mais le (sic) "poète cosmique atomique du rock français", comme l’écrira Philippe Manœuvre, ne rassure guère les producteurs déconcertés devant un être aussi inclassable.

DIFFICILE DE FAIRE 100 MÈTRES SANS UN «  SALUT MANU !  »

Il disparaît, laissant son nom ici ou là, resurgit au générique du thriller américain La Mémoire dans la peau. "J’assurais la sécurité sur le film. Ils avaient besoin d’un chauffeur de taxi, et c’est la star Matt Damon qui leur a suggéré de me prendre. Il m’avait repéré. Mon look l’amusait." Il collabore à de nombreux scénarios, dont celui de Camping, la comédie à succès de Fabien Onteniente avec Franck Dubosc, tout cela en dormant parfois à la belle étoile, sans lien terrestre, sinon celui qui l’unit viscéralement à Boulogne-Billancourt, où il revient toujours, les poches remplies de poèmes et de notes de guitare.

« Cette ville est la matrice de mon existence. Je me rends sur l’île Seguin pour écrire des poèmes. Je me promène dans Boulogne-Billancourt avec un plaisir toujours renouvelé. J’ai confiance. Les gens ici sont tellement gentils. Dans ce café, on m’a offert un pain au chocolat. »

Pendant ses déambulations, difficile d’échapper à un "Salut Manu !". De jolies passantes, aussi, le saluent. "C’est une chance, sourit-il. À 80 ans, je plais encore aux femmes." Il aime musarder dans les rues Diaz, Reinhardt et Fernand-Pelloutier: "Bingo, d’un seul coup, je me retrouve en 1950. Tu vois la grande maison blanche ? Si je gagne au loto, je la rachète et j’y mets tous mes potes, enfin, ceux qui sont encore en vie…"

 

Manu journal bbi

 
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Commentaires

  • Annie Meyrignac Piereschi
    • 1. Annie Meyrignac Piereschi Le 09/10/2018
    Le personnage est merveilleusement bien décrit. Que de bons souvenirs et ravie de l'avoir connu au début des années 80 au Bus !!!

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